2008-07-25 05:43:17 UTC
Bien sûr, cette information est fausse ! Mais elle a exactement la même signification que le déplacement, le 21 juillet dernier, de Monsieur Sarkozy à Dublin.
Montrer ses petits muscles
Le président de la République française, voulant montrer ses petits muscles à ses vingt-six collègues, a déclaré : « Les Irlandais devront revoter et je mettrai le veto à tout élargissement (de l’Union européenne) tant qu’il n’y aura pas de nouvelles institutions » (Le Figaro, 16 juillet 2008). En droit international, en effet, un traité, pour être valable, doit être ratifié dans les mêmes termes par tous les pays concernés. C’est pourquoi la situation irlandaise est une grosse épine dans le pied de ceux qui veulent poursuivre cette course folle à l’eurolibéralisme.
Nicolas Sarkozy et ses collègues du système de Bruxelles n’ont aucune raison, pour l’instant, de ne pas continuer leur harcèlement anti-démocratique, puisque les expériences passées leur donnent raison. Après l’échec du référendum sur le traité de Nice, en 2001, il n’avait fallu que seize mois à Dublin pour venir à bout du peuple irlandais et trouver un moyen de le faire revoter. A l’époque, la participation n’ayant été que de 34 %, l’argument pour justifier un nouveau référendum était tout trouvé. On y avait ajouté la question de la neutralité de l’Irlande qui avait été identifiée commue la principale raison du « non ».
C’est pourquoi Nicolas Sarkozy a rencontré 18 responsables politiques, syndicaux, associatifs, dont 11 pour le « oui » et 7 pour le « non ». Résultat : le Premier ministre irlandais a demandé du temps. Traduction : les Irlandais ne sont pas encore mûrs pour avaler l’idée d’un nouveau référendum. Nicolas Sarkozy et Brian Cowen vont donc se revoir en septembre. D’ici-là, il faudra « Comprendre les préoccupations qui avaient influé sur l’issue de ce référendum », c’est-à-dire proposer un bidouillage juridique justifiant un nouveau référendum.
Bidouillage juridique
En misant sur l’isolement des Irlandais, les hiérarques de Bruxelles ont un schéma tout prêt. En effet, le traité de Lisbonne précise que le nombre de commissaires européens sera égal aux deux tiers du nombre d’Etats membres à partir de 2014, sauf si les dirigeants européens en décident autrement à l’unanimité. Voilà la porte de sortie pour les Irlandais : chacun des Vingt-Sept garderait donc son commissaire. D’autres garanties pourraient être données aux Irlandais dans une déclaration annexée au traité de Lisbonne : le respect de leur neutralité et de leurs positions sur des sujets comme l’interruption volontaire de grossesse, encore interdite dans l’Ile, ou les questions de fiscalité qui continueraient à être réglées à l’unanimité. Ces propositions pourraient être débattues au Sommet européen d’octobre.
Le peuple d’Irlande a dit « non » au traité de Lisbonne. Le président de l’UE, N. Sarkozy, en demandant un nouveau référendum, et le Parlement européen, en votant le refus de la prise en compte du résultat irlandais, bafouent la souveraineté de ce peuple.
De la même façon, les gouvernements de la France et des Pays-Bas, dont les peuples avaient dit « non » au traité constitutionnel européen (TCE) en 2005, sont passés outre leurs peuples et ont décidé de déléguer l’adoption du traité de Lisbonne à leurs parlements.
Comment est-il encore possible d’envisager une quelconque possibilité de révision de ce traité constitutionnel simplifié modificatif, ou bien l’organisation d’une constituante européenne, face à cette crapuleuse alliance politique que livrent à nouveau la droite et une partie de la gauche, pour faire aboutir cette union soi disant européenne, autour du plus grand pacte atlantiste contemporain ?
Trahison
Pourtant, le 9 mai 2004, N. Sarkozy, affirmait à la Convention nationale de l’UMP : « A chaque grande étape de l’intégration européenne il faut donc solliciter l’avis du peuple. Sinon, nous nous couperons du peuple (...) Je le dis comme je le pense, simplement. Je ne vois pas comment il serait possible de dire aux Français que la Constitution européenne est un acte majeur et d’en tirer la conséquence qu’elle doit être adoptée entre parlementaires, sans que l’on prenne la peine de solliciter directement l’avis des Français (...) Je crains dans ce cas (vote parlementaire) une réaction d’incompréhension sévère de nos compatriotes. »
L’Union européenne se coupe des peuples. Elle fabrique à grande échelle du nationalisme, de la xénophobie, du repli sur soi. Les peuples doivent donc consommer cette cassure avec cette union de façade afin de pouvoir envisager autrement un vrai projet de société internationaliste.
Le peuple français, berceau d’origine des Droits de l’homme et du citoyen se doit, dans la période ou un de ses représentants assure la responsabilité de la présidence de l’Union européenne, de dénoncer ces forfaitures et de proposer une issue possible à ce lamentable jeu de saute mouton au-dessus de la souveraineté populaire.
Un mouvement général de défiance vis-à-vis des peuples
Cette actualité irlandaise n’est pas isolée du reste des évènements de ces derniers jours : révision constitutionnelle en France et négociations à Genève au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans ces trois cas, qui pourtant ne semblent pas avoir de lien entre eux, on retrouve pourtant une même logique : la peur des peuples et l’autoritarisme pour y faire face.
Ce que les oligarques européens veulent remettre en cause en Irlande, c’est le droit du peuple irlandais à disposer de lui-même ; avec la révision constitutionnelle en France, le peuple est interdit de parole alors qu’il s’agit de modifier la loi fondamentale ; avec les négociations à l’OMC, 30 pays s’arrogent le droit de débattre en secret pour les 123 autres.